vendredi 16 décembre 2011

La surprenante Triennale Québécoise



La surprenante Triennale Québécoise

Photo fournie par le Musée d'art contemporain de l'oeuvre de Jacynthe Carrier

La Triennale Québécoise, c’est une cinquantaine d’artistes qui occupent tout le musée en plus de sites extérieurs environnants aux abords de la place des arts, et ce, jusqu’au trois janvier 2012. Nous sommes également conviés à assister à des performances en direct tous les mercredis soirs dans la salle Beverley Webster Rolph jusqu’au trente novembre ainsi qu’à une  nocturne tous les premiers vendredis du mois. Lors de ces nocturnes qui se déroulent de dix-sept à vingt-et-une heures, nous pouvons découvrir le musée et l’exposition autrement, et ce, grâce à la création d’une ambiance festive à laquelle contribue un bar et de la musique live. Le Musée d’art contemporain de Montréal nous invite donc à cette deuxième Triennale intitulée Le travail qui nous attend qui est un événement d’envergure où nous ne pouvons qu’être frappés par la diversité des pratiques artistiques actuelles. C’est à cet éclectisme que renvoie le titre. Toutefois, il n’a pas été créé pour l’occasion. En effet, le titre est emprunté à celui de l’exposition de Grier Edmundson qui eut lieu en 2009. L’exposition de Grier visait, elle-même, à montrer la multiplicité des moyens utilisés dans les œuvres de l’artiste qui pouvaient faire échos à des œuvres marquantes du passé, mais extraites de leur contexte historique. Donc, cet artiste réfléchit aussi sur l’art actuel puisque les artistes renvoient souvent aux œuvres de leurs prédécesseurs. Par conséquent, ce titre semblait tout à fait approprié pour cette Triennale, qui est le résultat du travail d’une équipe de commissaires, dont le but est de nous présenter un portrait représentatif de l’art actuel en plus de nous faire connaitre la relève en nous présentant en grande partie de jeunes artistes. Lors de cette traversée qui nous sort du musée et dans laquelle tous nos sens sont sollicités, nous sommes en mesure de voir l’orientation que prend l’art et de constater, au fil du parcours, que les artistes s’approprient les préoccupations actuelles. C’est qu’une grande partie des artistes traitent de notre rapport aux choses, mais surtout des conséquences de nos gestes et des transformations qu’ils opèrent sur l’environnement.  C’est pourquoi les artistes nous demandent, grâce à leurs œuvres, de prendre le temps de voir ce qui se passe autour de nous. D’autres, pour leur part, se penchent sur le processus de création menant à l’œuvre. Notamment, Massimo Guerrera qui nous prouve que l’art est un outil pouvant servir à créer un lien entre les individus, ce qui vient parallèlement légitimer les moyens utilisés par les autres artistiques qui désirent, grâce à l’art, attirer notre attention sur les préoccupations actuelles.  L’installation de Guerrera nous confronte d’abord à un désordre qu’on ne peut qualifier, mais qui fait en sorte qu’on ne sait pas ce qu’il faut regarder exactement entre le matériel, les œuvres et les écrits. En fait, il s’agit de son atelier qu’il a recréé pour l’occasion et dans lequel il nous invite à entrer.  Cette intrusion dans l’univers de l’artiste crée un espace de rencontre chaleureux propice à la discussion.  Les œuvres suivantes, qui abordent le rapport de l’homme avec son environnement, réussiront assurément à capter l’attention d’une grande partie du public et en particulier la projection vidéo Rites de Jacynthe Carrier qui est projetée sur trois écrans simultanément. Dans cette vidéo, l’artiste aborde les questions du rapport de l’homme à la terre en plus de celle de la surexploitation des ressources, entre autres, à l’aide d’une allégorie où une femme est employée pour représenter la terre. Cette dernière entre en contact avec d’autres individus en plus de partager le même espace qu’eux.  Les enregistrements sonores de Magali Babin sont une découverte, car l’artiste utilise un médium peu courant.  Elle nous propose plusieurs minutes d’enregistrements qui nous dévoilent le territoire sonore du St-Laurent qui est formé des bruits de fond du fleuve, mais également des sons de l’environnement extérieur qui sont captés par l’eau. Ainsi, elle crée un rapport de proximité entre celui qui écoute et l’environnement du fleuve, qui fait pourtant partie de notre environnement, mais que nous ne prenons pas le temps d’écouter. D’un autre côté, elle pose également un regard critique sur la pollution sonore. Néanmoins, cette intrusion inattendue donnera surement envie à plusieurs d’entre nous de rester collés au siège durant de longues minutes, car ces enregistrements piquent notre curiosité. Durant notre parcours, nous pouvons aussi découvrir des œuvres qui utilisent des matériaux peu traditionnels, tel que l’œuvre du collectif The User intitulée Quartet for Dot Matrix Printers où des imprimantes produisent une symphonie musicale ou même le ballon dirigeable formé de plumes intitulé aerie: clear channel de jake moore. Un grand nombre d’artistes utilisent également plusieurs médiums dans une même œuvre, tels que la photographie, la vidéo et l’écriture. À cet égard, la dernière réalisation de Thomas kneubühler intitulée Under Currents, qui nous présente une réflexion sur la construction des centrales hydroélectriques dans le Nord du Québec, est assez représentative. Cette recherche de la part des artistes concernant l’emploi d’éléments nouveaux provient assurément d’un désir d’attirer l’attention des visiteurs, car depuis quelques décennies les artistes tentent d’échapper à la définition traditionnelle de l’art en tentant continuellement de transgresser les limites et de susciter une réaction chez le public.
Photo fournie par le Musée d'art contemporain de l'oeuvre de Rafael Lozano-Hemmer

Finalement, l’œuvre gigantesque Intersection articulée de Rafael Lozano-Hemmer, qui fut présentée jusqu’au six novembre, et ce, pour le grand plaisir des passants du quartier de la place des Festivals et des citadins qui ont pu observer les rayons lumineux, dont les passants pouvaient actionner une des six barres pivotantes permettant de contrôler un des nombreux faisceaux lumineux, dont les rayons s’étendaient sur quinze kilomètres, était certainement une des œuvres les plus marquantes. Effectivement, cette installation créait un spectacle de vaisseaux lumineux ahurissant, et ce, premièrement à cause de la distance que couvraient ses rayons, mais aussi à cause de leurs mouvements aléatoires.  Ce spectacle de lumière n’était d’ailleurs pas sans rappeler les spectacles pyrotechniques qui réussissent eux aussi très facilement à capter l’attention du spectateur.
Bref, la Triennale est l’événement incontournable de l’automne pour ceux qui désirent découvrir
ce qui se passe dans le monde artistique. Nous avons également pu remarquer, une fois de plus, que les pratiques artistiques axées sur la relation avec le public sont populaires, et ce, depuis quelques années.  Cet intérêt s’explique probablement par le désir des artistes de recréer le contact avec le public qui s’est distancié de l’art, car il ne la comprenait plus.  Par contre, la cohérence dans les choix des commissaires ne semble pas toujours présente et il fut parfois facile de perdre le fil directeur en passant d’une œuvre à l’autre.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire